Conseil Lecture : Le Passeport, de Julia Galaski

Née de père franco-israélien et de mère allemande catholique, Julia Galaski, que l’on sent proche de la cause palestinienne (sans qu’elle le dise directement) et attirée par le monde arabe, demande à partir à Jérusalem durant une année d’étude. À sa grande surprise, elle se voit délivrer, sans l’avoir le moins du monde demandé et sans le désirer, un passeport israélien. Soudain, c’est toute la question de l’assignation à une identité qui se trouve posée à elle. Imposée même.

Son récit convoque alors ses ascendants, et leurs origines si mélangées, si diverses, si éloignées, justement, de l’assignation à une « citoyenneté », quelle qu’elle soit. Plus que bien des grandes analyses sociohistoriques, c’est tout un passé de mélange et métissage, de voisinages féconds que l’on sent ressurgir entre les lignes de ce texte. On n’est pas sans éprouver un certain vertige lorsqu’elle évoque ses oncles et ses tantes, presque tout autant juifs que Polonais, Marocains puis Français d’Algérie et enfin Israéliens, dans une identité qui, aujourd’hui peine à accepter les métissages et les nuances, les proximités, les passages.

Tout au long du livre, l’autrice cherche à tisser un lien avec les générations précédentes, peut-être à comprendre, aussi, d’où elle vient, alors que le monde d’aujourd’hui préfère parler uniquement de là où l’on se tient. C’est tellement plus facile, mais aussi tellement réducteur, comprend-on en lisant ce texte.

Le Passeport, de Julia Galaski, est un texte touchant dans lequel le politique et l’intime se mêlent de manière profonde et étroite. Une belle réussite qui trouve très bien sa place aux Éditions Les Étaques, que l’on aime beaucoup à Pied-de-biche Marque-page pour leurs textes toujours à la lisière entre les sciences sociales et la littérature. Oui, décidément, les lisières sont fertiles.

Antonin

 

Le Passeport, Julia Galaski

520 pages , 18 euros
Editions les etaques (paru en janvier 2022)