L’enfance en contre-plongée
C’est un livre magnifique, autant le dire tout de suite, que ce « Prends toutes les rues qui montent » de Murielle Holtz. On y suit Veevie, son frère Jojo et leur mère Suzanne, à Saint-Etienne (jamais nommée, l’autrice dit « la Grande Noire » et ça lui va très bien) pendant la Deuxième Guerre Mondiale. Le père, prisonnier, est devenu comme un inconnu, un ogre à qui l’on doit envoyer colis alimentaire sur colis alimentaire. Veevie, c’est par elle que se raconte principalement l’histoire, est pleine de vie, et c’est là toute la réussite et la beauté de l’écriture de Murielle Holtz : elle est extrêmement vivante, éclatante même, malgré la thématique dramatique qui se noue rapidement. Car le train-train vite posé de la petite Veevie est anéanti par les bombardements des Alliés qui en 1944 agenouillèrent la ville de Saint-Etienne et coutèrent la vie à presque mille personnes. La vie de Veevie et de sa famille bascule alors, et le retour du père, tant attendu, n’arrangera rien.
Le rythme particulier du phrasé, très musical -ou théâtral parfois (Murielle Holtz est une artiste aux multiples facettes) – donne un effet de réel très fort à ce texte à hauteur d’enfant qui ne tombe pourtant jamais dans la facilité. De même les images et les symboles, très présents, ne sont jamais lourds, jamais de trop. Ils offrent de cette période une expérience vivace et, encore une fois, brillante.
Disclaimer : Murielle est une amie que je connaissais bien avant qu’elle n’écrive des romans, elle faisait des spectacles de chants et du théâtre et déjà, je trouvais ça formidable. Ce livre n’échappe pas à la règle, mais promis j’essaie d’être objectif dans cette chronique.
-Antonin
Prends toutes les rues qui montent Murielle Holtz - Presses de la Cité 224 pages - 21 euros